Historique de l’unité
Le LIED, Laboratoire Interdisciplinaire des Énergies de Demain, a été créé en janvier 2013 à l’initiative de la présidence de l’université Denis-Diderot et de la direction du CNRS, comme unité propre de recherche de l’Université, et reconnu par le CNRS comme FRE dans un premier temps puis comme unité mixte de recherche (UMR 8236) à compter de janvier 2014. Créé ex-nihilo par des enseignants-chercheurs et personnels provenant d’autres unités de recherches ou composantes de l’Université ou recrutés sur l’un des 14 postes créés et pourvus par l’Université et le CNRS pour le laboratoire, le LIED a été conçu sur un projet fondamentalement interdisciplinaire plaçant la thématique de l’énergie au cœur d’enquêtes convergentes associant plusieurs disciplines scientifiques, le plus souvent sciences sociales et sciences de la nature. Son programme a fait l’objet depuis 2009 de discussions approfondies dont les conclusions ont été présentées à l’occasion de deux colloques « construire l’interdisciplinarité » en avril 2010 et en janvier 2013. Il regroupe actuellement 19 enseignants-chercheurs provenant des Universités Paris-Diderot et Paris-Descartes et de l’ESCP, 7 personnels ITA-BIATTS et 16 doctorants et post-doctorants. Trois enseignants-chercheurs de l’Université Paris-Diderot, 1 DR CNRS et 2 enseignants-chercheurs de l’ESIEE, ont demandé à être rattachés au LIED en 2017-2018.
Rapport Hceres
L’objet énergie
L’énergie est au cœur des recherches du LIED. S’agissant d’un objet central ou très important pour de nombreuses unités de recherches déjà existantes, aussi bien dans les domaines de physique et de biologie que dans les sciences sociales, la création d’un nouveau laboratoire doit se justifier par le caractère innovant des objets qu’il examine et des démarches qu’il met en œuvre. Dans la perspective interdisciplinaire qui justifie en fin de compte l’existence du laboratoire, l’énergie est conçue en premier lieucomme l’une des questions essentielles qui se pose au monde contemporain. Celasignifie qu’elle n’est pas définie en première instance ou approchée dans la démarche scientifique à partir de la place centrale qu’elle tient dans les domaines des sciences de la nature, mais par son implication croissante dans les questions économiques, sociales et politiques de notre temps. On trouve donc au cœur des programmes du laboratoire les questions dela transition énergétique en cours et à venir, des énergies renouvelables, des hypothèses de pic ou d’épuisement des ressources, des dynamiques d’efficacité et de sobriété, des conséquences économiques, sociales ou cognitives des processus d’innovation et des questions de consommation et de précarité, entre autres.
Une conviction commune à tous les membres du laboratoire est que la réponse aux problèmes actuels et à venir en matière de climat et d’énergie ne peut se limiter à la mise au point de technologies spécifiques, aussi innovantes soient-elles, mais qu’elle doit prendre en compte les contextes dans la totalité de leurs éléments, c’est-à-dire aussi bien dans leurs fondements matériels que dans leurs dimensions sociales. Pour cette raison, le LIED se présente comme une unité de recherche tant fondamentale qu’appliquée, qui prend en compte chacune de ces questions de façon concrète dans des conditions qui appellent à la fois les interrogations des sciences humaines et sociales et l’expertise des sciences de la nature, physique et biologie en premier lieu. Dans chacun des domaines scientifiques concernés, le choix fait par les chercheurs du LIED est de remonter aux aspects fondamentaux des questions en utilisant, en améliorant ou en créant leurs propres outils disciplinaires. Si la résolution de ces questions résulte à termeen un processus d’innovation, la construction interdisciplinaire du problème permettra, en affrontant les enjeux sociétaux en même temps que les verrous scientifiques, de faire l’économie de la question d’acceptabilité ex-postdes réponses technologiques et/ou institutionnelles proposées. Pour qu’une telle enquête soit possible, il est essentiel que sciences sociales et sciences de la nature soient impliquées et en dialogue à toutes les étapes de la recherche.
Dans sa version initiale de 2013, le programme du LIED était construit sur une double configuration associant deux enquêtes à dominante de sciences fondamentales et appliquéesTransport instabilités et fluctuations énergétiques et Matériaux et biomatériaux innovants, d’une part, et deux enquêtes à dominante de sciences sociales,Échelle des territoires et Échelles du politique de l’autre,articulées sur un axe conjoint Énergie et interdisciplinarité. Au terme de ce premier contrat, cette configuration a évolué vers un autre dispositif, articulant trois pôles thématiques interdisciplinaires, Territoires et sociétés, Systèmes vivants et Efficacité énergétique. Il s’agit moins d’un changement de perspective que d’un développement des dynamiques de recherches, traduisant le succès de certaines enquêtes, la mise en sommeil d’autres et l’émergence de thèmes nouveaux, dans une continuité fondamentale de perspective. De fait, la double problématique matériaux/ressources et réseaux/interactionsqui avait inspiré le programme initial reste au centre du projet du LIED et participe à chacun de ces thèmes.
La pratique de l’interdisciplinarité
Une lecture trop rapide des documents du LIED pourrait suggérer que les trois pôles thématiques mentionnés ci-dessus dissimulent une simple répartition disciplinaire des enquêtes et des chercheurs, Territoires et sociétés rassemblant les sciences sociales du LIED, Systèmes vivants sa biologie et Efficacité énergétique sa physique. Il n’en est rien : cette répartition en trois domaines caractéristiques découle d’une conception à la fois pragmatique et très articulée, qui fait consensus à l’intérieur du LIED, des rapports entre discipline et pratique interdisciplinaire. Ce sujet, crucial pour l’équilibre du laboratoire, fait l’objet d’une réflexion constante de la part des chercheurs du LIED.Il influe sur la définition de ses thèmes de recherches, sur son organisation et sur son fonctionnement. Au terme de ce premier contrat, il convient de considérer la construction et la stabilisation de ce consensus comme un résultat essentiel de la recherche du LIED, car il conditionne ledynamisme collectif d’un groupe de chercheurs soumis en permanence à l’action centrifuge ou dissociative des pratiques disciplinaires courantes.
Dans sa configuration actuelle, le LIED regroupe des physiciens (sections 28, 29 et 30 du CNU) des biologistes (sections 64, 65 et 87 du CNU) et des spécialistes de sciences sociales (sections 5, 19, 21, 23 et 24 du CNU). Pour autant, le laboratoire ne se structure pas en équipes disciplinaires spécialisées en physique des énergies, biologie des énergies et sciences sociales des énergies. Mais il n’a pas non plus l’ambition de donner naissance à une « discipline interdisciplinaire » des énergies, qui serait sans objet, fondements théoriques ou méthodesbien définis. Son objectif est de progresser par des approches fondamentales dans la connaissance de certaines questions énergétiques en recourant à la collaboration de spécialistes de disciplines différentes, si possible, en particulier en joignant et faisant converger approches de sciences de la nature et de sciences sociales.
Du point de vue du présent dossier, cette situation a des implications très importantes sur la présentation du laboratoire et sur l’énoncé de ses résultats de recherche. Dans l’optique d’une évaluation interdisciplinaire, l’accent a été mis sur les réalisations effectivement interdisciplinaires, qui sont la raison d’être du laboratoire et qui font l’objet de la première partie du document. Mais dans la mesure où la pratique d’une recherche interdisciplinaire ne saurait se détacher, pour chacun des membres du LIED, de son appartenance à sa communauté disciplinaire, et dans la mesure aussi où, pour plusieurs de ces disciplines, le travail de recherche se fait dans le cadre d’équipes, on trouvera dans la troisième partie de ce rapport une présentation de la composition disciplinaire du laboratoire et de ses équipes, quand elles existent, ainsi que l’exposé de leurs recherches non interdisciplinaires. Cette présentation disciplinaire ne constitue en aucun cas une atténuation de sa nature interdisciplinaire : la réflexion qu’elle présente sur les caractères spécifiques de la biologie, la physique et les sciences sociales mis en pratique au LIED vise à expliciter son projet à partir d’un autre point d’observation.
Chacun des chercheurs impliqués dans un programme interdisciplinaire l’est en effet au titre de sa propre discipline, dont il doit utiliser au mieux les ressources, et dans le cadre de laquelle sa production et sa carrière sont évaluées. Sa confrontation avec des chercheurs d’autres domaines n’a pas seulement pour objectif et pour résultat l’obtention de résultats interdisciplinaires. Les effets en retour de cette confrontation sur sa pratique de sa propre discipline font partie des résultats attendus de sa recherche. De fait, chacun d’entre eux peut et est incité à exploiter dans son propre domaine disciplinaire sa contribution au travail collectif, ou les résultats de celui-ci. La liste des produits de la recherche du LIED ne comprend donc pas seulement des publications attendues signées de chercheurs de plusieurs disciplines. Elle est même composée en très large partie de produits scientifiques mono-disciplinaires, qui ne portent pas forcément sur des thèmes énergétiques au sens strict et dont la convergence thématique résulte du travail collectif interdisciplinaire, mais qui doivent aussi s’évaluer à la mesure de l’excellence dans chaque domaine. En d’autres termes, chaque produit associant plusieurs disciplines résulte d’un investissement dans chacune d’elles, qui donne lieu à publication selon les pratiques reconnues dans la communauté de recherche.
La très large ouverture du LIED se marque ainsi dans la liste de ses produits de recherches par un ensemble de titres qui peut sembler hétéroclite, puisqu’on y trouvera aussi bien des publications relevant du secteur des humanités (où les actes de colloques ont une grande importance et où l’anglais n’est pas la seule langue scientifique) et d’autres relevant de domaines des sciences et applications où s’est imposée la pratique de la publication en revues ACL. La volonté de mener à terme des enquêtes mobilisant les unes et les autres implique des choix de publication très variables, dans la mesure où il n’existe pas actuellement de véritables revues ou plateformes de publications interdisciplinaires de haut niveau.